Portrait d'une professionnelle heureuse : Angélique Capelle Voisin - Médecin sexologue. Par Laure Caille, CICEA, 23 Mars 2023

Une femme médecin passionnée de relations humaines 

Je suis médecin sexologue. J’ai un savoir-faire médical et des compétences en relations humaines. La sexologie, c’est partir d’un symptôme sexuel et chercher tout ce qu’on peut faire pour améliorer ce problème, à la fois en cherchant des solutions médicales, mais aussi en explorant la relation de couple ou la recherche de relation.

Une médecine gratifiante et joyeuse 

J’ai choisi de faire médecine il y a 34 ans, car je voulais apporter mon aide aux autres. J’ai pratiqué la médecine d’urgence, la médecine du sport, mais cela ne me comblait pas et me fatiguait beaucoup. La sexologie est une médecine extrêmement gratifiante car dès la 1ʳᵉ consultation, les patients se sentent mieux. Je découvre la force du psychisme humain quand je vois, face à la lourdeur de certaines pathologies, l’incroyable capacité d’adaptation et de résilience de l’être humain.En sexo, il n’y a pas d’urgence ! Quel bonheur de voir une patiente se transformer, redevenir féminine, souriante, solaire alors qu’elle a vécu une violence sexuelle par le passé. Quelle joie de recevoir un faire-part de naissance de la part d’une femme qui souffrait de vaginisme (trouble sexuel qui rend douloureuse ou qui empêche la pénétration) ! 

La sexologie, c’est une médecine très émotionnelle. On rit, on pleure parfois, on peut mettre un peu d’humour. Faire du bien autour de moi, me fait du bien.

La douceur de la vie

Je fais de la sexologie depuis 12 ans en libéral. Je me sens très à l’aise et confiante. Je suis à ma juste place. Je ne ressens plus le besoin de prouver quoi que ce soit. Je consulte dans un cadre magnifique que j’ai fait à mon image proche de chez moi. Je vais travailler à vélo en longeant la mer. Avant même de commencer à travailler, je suis bien. Je ressens une grande liberté dans ma vie professionnelle quotidienne.Je suis d’une personnalité très douce. Cela a été un problème pour moi dans ma vie passée, car j’avais du mal à cadrer mes consultations, à refuser, je travaillais comme une folle en ayant toujours quelque chose à prouver. Aujourd’hui, ma douceur est un atout. Mes patients ont besoin de se sentir accueillis avec douceur pour se confier sur ce qu’ils vivent. Si mes patients ne se sentent pas en confiance, il y a une résistance, ils ne peuvent pas se laisser guider.

Une médecine de challenge

Chaque histoire est différente. Chaque couple est différent. Les cultures sont différentes. Le challenge est de trouver des solutions adaptées à chaque cas. Comment restaurer la capacité à avoir une intimité même en cas de maladie très grave comme une sclérose en plaque ou un cancer ? Comment se sentir suffisamment femme pour faire l’amour après une chirurgie du sein ou à la suite d’une chimio lorsqu’on a perdu ses cheveux ? Comment faire l’amour quand on n’a plus d’érection ? 70% des patients qui ont eu un cancer (tous cancers confondus à 2 ans de leur diagnostic), ont des troubles sexuels. C’est compliqué pour la patiente et pour son conjoint qui peut avoir peur de faire mal, ne plus oser. Les deux partenaires peuvent se sentir moins désirables, rejetés. Cela parle d’amour car si on ne se sent plus en capacité d’être désiré, on ne se sent plus en capacité d’être aimé. En sexologie, je guide les patients à trouver leurs solutions pour re-co-construire une nouvelle intimité, pénétrante ou non. La fonction sexuelle est souvent oubliée dans l’urgence de la prise en charge médicale pour sauver la vie. La sexologie est un soin de support pour la restaurer. Mais très peu de gens savent qu’ils peuvent être aidés.Et puis aujourd’hui, on peut parler du plaisir féminin et changer les mentalités sur ce sujet. Je fais aussi des conférences au Maghreb sur ce sujet. De nouveaux outils, tant techniques que psychologiques, existent pour restaurer le désir et les sensations. Il y a tellement de possibilités pour aider les gens !

Je sais que je ne sais rien

Je fais preuve d’une grande empathie. Je dois comprendre le fonctionnement de chacun. Même quand je soigne un agresseur sexuel, il faut que j’aie de l’empathie. Je ne suis pas juge, je suis médecin. S’ils se remettent en question, c’est plus simple pour moi. S’ils ne se remettent pas en question, je ne peux pas les accompagner. Je les adresse alors à une psychiatre spécialisée dans la violence, le docteur Marie Reveillaud. Il n’y a aucun jugement dans mes consultations. Je suis seulement là pour guider un peu. Chaque personne garde son libre arbitre. Je donne des idées, des pistes, un autre regard sur la problématique. C’est le patient qui détient son pouvoir de guérison. Il est l’acteur de son changement, je ne peux pas soigner les gens malgré eux. J’adore le point de bascule où je les vois évoluer, comprendre, avoir un déclic. Ils chaussent de nouvelles lunettes et regardent le monde autrement et là je me dis : « Ça y est !». Ce point de bascule n’est jamais au même moment, je ne m’ennuie jamais.

Apprendre à se connaitre

J’ai longtemps pris ma douceur pour une faiblesse alors que c’est une grande force ! Avec le temps, on apprend à se comprendre, à se trouver. On a le droit de se tromper, de prendre des chemins détournés, de changer d’avis, de prendre une autre voie. Je ne regrette pas mes choix. Rien n’est figé. Apprendre c’est merveilleux. Et on peut reprendre des études à tout âge !